Cass. com., 20 mars 2019, n°17-22.417
Lorsqu’un nouveau syndic demande à l’ancien syndic, placé en liquidation judiciaire, la remise des fonds, documents et archives du syndicat ainsi que l’état des comptes de ce dernier et de celui des copropriétaires, l’action qu’il exerce à cette fin en application de l’article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965 échappe à l’interdiction des poursuites de l’article L.622-21, I, du Code de commerce, dès lors qu’elle tend au respect d’une obligation légale, inhérente à la profession de syndic, et non au paiement d’une somme d’argent.
Une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l’encontre d’un syndic de copropriété par jugement du 18 décembre 2013. Le nouveau syndic désigné pour lui succéder a mis en demeure le liquidateur afin d’obtenir la remise des fonds et documents prévue en application de l’article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965, à savoir les documents et archives du syndicat, l’état des comptes du syndic et des copropriétaires, puis l’a assigné sous astreinte.
La cour d’appel a condamné le liquidateur du syndic initial à la remise sous astreinte de l’ensemble des pièces, archives et trésorerie de la copropriété. Celui-ci a formé un pourvoi en cassation, en se fondant sur les règles relatives aux entreprises en difficulté. Au soutien de son pourvoi, le liquidateur soutenait que seules les créances visées à l’article L.622-17 du Code de commerce, à savoir celles nées régulièrement après le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d’observation, ou en contrepartie d’une prestation fournie au débiteur pendant cette période, échappaient à l’interdiction des actions en justice tendant à la condamnation du débiteur en paiement d’une somme d’argent.
Or, pour le liquidateur, la cour d’appel n’avait pas recherché si la créance litigieuse était née pour les besoins de la période d’observation ou de la procédure ou en contrepartie d’une prestation fournie à son profit. Pour le liquidateur, la dette pesant sur un syndic en liquidation judiciaire, légalement tenu de remettre à son successeur la situation de trésorerie, la totalité des fonds disponibles et l’ensemble des documents et archives du syndicat ne naît ni pour les besoins de la période d’observation ou de la procédure, ni en contrepartie d’une prestation fournie au syndic. En conséquence, pour le demandeur au pourvoi, la règle de l’interdiction des poursuites devait s’appliquer et s’opposer aux demandes formulées par le nouveau syndic.
La Cour de cassation confirme la solution dégagée par la cour d’appel et rejette le pourvoi en retenant que : « lorsque le nouveau syndic demande à l’ancien syndic en liquidation judiciaire la remise des fonds, documents et archives du syndicat ainsi que l’état des comptes de ce dernier et de celui des copropriétaires, l’action qu’il exerce à cette fin en application de l’article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965, échappe à l’interdiction des poursuites de l’article L.622-21, I, du Code de commerce, dès lors qu’elle tend au respect d’une obligation légale, inhérente à la profession de syndic, et non au paiement d’une somme d’argent. »
La Haute Cour considère ainsi qu’il est inutile d’analyser le caractère antérieur ou postérieur de la créance, tout comme son utilité ou non. La Cour de cassation estime que les dispositions prévues à l’article 18-2 de la loi de juillet 1965 énoncent une obligation légale spéciale, qui permet d’écarter le droit commun des entreprises en difficulté.
A rapprocher : Article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965 ; Article L.622-21, I, du Code de commerce ; Article L.622-17 du Code de commerce