Cass. civ. 3ème, 7 février 2019, n°17-31.229
Les dispositions de l’article L.145-9 du Code de commerce, dans leur rédaction issue de la loi du 4 août 2008, en vertu desquelles le congé doit être donné pour le dernier jour du trimestre civil et au moins six mois à l’avance, ne s’appliquent qu’aux congés délivrés au cours d’une tacite prorogation du bail commercial et non à l’occasion d’un congé donné en fin de période triennale. Ces derniers doivent quant à eux être donnés au moins six mois à l’avance pour cette date.
Dans l’affaire commentée, un locataire ayant pris à bail commercial des locaux pour une durée de neuf années commençant à courir le 19 février 2007, a donné congé à son bailleur par acte le 10 septembre 2009 à effet du 31 mars 2010 (dernier jour du trimestre civil) dans le but de mettre fin au bail en cours à l’issue de la période triennale arrivant à échéance au 18 février 2010.
Estimant que le congé délivré est irrégulier, le bailleur a alors assigné son locataire en paiement de diverses sommes au titre, d’une part, des loyers et charges dus jusqu’au terme de la seconde période triennale du bail commercial, assorties des intérêts au taux contractuel de 1 % à compter de chaque période échéance mensuelle et, d’autre part, des réparations locatives.
Selon lui, par application combinée des articles L.145-4 et L.145-9 du Code de commerce dans leur rédaction applicable au litige, le congé délivré est irrégulier en ce que le délai de six mois précédant l’expiration de la période triennale n’a pas été respecté. Il soutient que celui-ci aurait donc dû être délivré au plus tard le 18 août 2009.
Il ajoute que, les dispositions de l’article L.145-9 du Code de commerce, dans leur rédaction issue de la loi du 4 août 2008, selon lesquelles le congé doit être « donné pour le dernier jour du trimestre civil et au moins six mois à l’avance », ne sont applicables qu’en cas de tacite prorogation du bail et non dans l’hypothèse d’un congé donné en cours de bail, à l’issue d’une période triennale, comme c’est le cas en l’espèce.
Le locataire soutient quant à lui que le congé est régulier dès lors que, conformément aux dispositions de l’article L.145-9 du Code de commerce, un délai de six mois a été respecté entre le congé et le dernier jour du trimestre civil.
Il affirme qu’il résulte de l’article L.145-4 du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 13 juillet 2006 que « la durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans », mais, « à défaut de convention contraire, le preneur a la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale, dans les formes et délai de l’article L.145-9 du même code ». Selon lui, l’article L.145-9 du Code de commerce est applicable en l’espèce et n’est pas limité à l’hypothèse d’un congé délivré en matière de renouvellement du bail dès lors qu’il désigne expressément « les baux soumis aux dispositions du présent chapitre » dont l’intitulé est « du bail commercial », sans distinguer le bail initial du bail renouvelé.
Si le tribunal de grande instance de Versailles a fait droit à la demande du bailleur en considérant le congé comme étant irrégulier, il en va autrement pour la Cour d’appel de Versailles. En effet, celle-ci a admis que l’article L.145-9 du code s’appliquait non seulement aux congés délivrés dans le cadre d’une tacite prorogation du bail commercial, mais également aux congés délivrés en cours de bail, à l’issue d’une période triennale. Le congé pouvait valablement être délivré le 10 septembre 2009 pour le 31 mars 2010.
La troisième chambre civile de la Cour de cassation a censuré le raisonnement des juges du fond relatif au caractère régulier du congé, pour violation des articles L.145-4 et L.145-9 du Code de commerce. Ce deuxième article n’est applicable qu’aux congés délivrés dans le cadre d’une tacite prorogation. Par conséquent, la partie qui envisage délivrer un congé en cours de bail commercial doit respecter un délai d’au moins six mois avant la fin de la période triennale. Le congé ne respectant pas ce délai est irrégulier. Il en va ainsi, en l’espèce, lorsqu’il est délivré après le 18 février 2019.
La Cour de cassation avait déjà admis, dans un arrêt antérieur, que le délai prévu par l’article L.145-9 ne s’appliquait pas à l’occasion d’un congé donné en fin de période triennale (Cass. civ. 3ème, 3 juillet 2013, n°12-17.914).
En raison du manque de clarté des dispositions précitées, la loi n°2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives a modifié les premiers alinéas de l’article L.145-9 du Code de commerce. L’article distingue désormais expressément les délais à respecter en cours de bail commercial des délais à respecter au cours d’une tacite prolongation.
A rapprocher : Article L.145-4 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 13 juillet 2006 ; Article L.145-9 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 ; Cass. civ. 3ème, 3 juillet 2013, n°12-17.914, Publié au bulletin