Cass. civ. 3ème, 14 février 2019, n° 17-26.403
La clause du contrat de maîtrise d’œuvre, excluant la responsabilité solidaire de l’architecte, en cas de pluralité de responsables, n’est pas limitée à la responsabilité solidaire et s’applique également à la responsabilité in solidum.
L’architecte, débiteur des garanties légales, décennale, biennale, et de bon fonctionnement, telles que prévues par les articles 1792, 1792-2, 1792-3 et 2270 du code civil, est exposé à la condamnation in solidum avec les autres constructeurs.
L’obligation in solidum, d’origine jurisprudentielle, est différente de l’obligation solidaire. Lorsque les constructeurs ont concouru à la réalisation du même dommage, le maître d’ouvrage peut actionner n’importe lequel d’entre eux et lui réclamer la réparation de l’intégralité de son préjudice. La dette est ensuite répartie entre les constructeurs en pourcentage au regard de leurs fautes dans le cadre des recours subrogatoires.
En l’espèce, un maître d’ouvrage avait déclaré un sinistre à son assureur dommages-ouvrage, lequel avait préfinancé les travaux de réparation.
Après expertise judiciaire, l’assureur, subrogé dans les droits du maître d’ouvrage, avait assigné les intervenants fautifs en remboursement des sommes versées au titre des travaux de reprise et ce au terme d’une demande de condamnation in solidum.
Le jugement de première instance avait accueilli l’action subrogatoire de l’assureur.
La Cour d’appel, de son côté, infirmait le jugement ayant condamné in solidum les différents responsables, dont notamment l’architecte, l’entreprise et le contrôleur technique, ainsi que leurs assureurs respectifs.
La Cour d’appel estimait en effet que la décision de première instance avait été prise en violation de la clause figurant aux conditions générales du contrat d’architecte, selon laquelle : « l’architecte assume sa responsabilité professionnelle telle qu’elle est définie par les lois et règlements en vigueur, notamment les articles 1792, 1792-2, 1792-3 et 2270 du code civil, dans les limites de la mission qui lui est confiée. Il ne peut donc être tenu responsable, de quelque manière que ce soit, et en particulier solidairement, des dommages imputables aux actions ou omissions du maître d’ouvrage ou des autres intervenants dans l’opération faisant l’objet du présent contrat (…) ».
Selon la Cour d’appel, l’utilisation dans la clause litigieuse de l’expression « en particulier » permettait de considérer que l’exclusion n’était pas limitée à la condamnation solidaire et s’étendait également à la responsabilité in solidum.
L’arrêt d’appel était frappé d’un pourvoi motif pris de la dénaturation de la clause litigieuse au visa des articles 1147 ancien du code civil devenu 1231-1.
La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle approuve l’interprétation retenue par la Cour d’appel de la clause litigieuse en raison de l’emploi du terme « en particulier ».
Ainsi, la Cour de cassation confirme que l’architecte est autorisé à prévoir dans son contrat que sa responsabilité ne puisse être engagée solidairement, ou in solidum, avec celle des autres constructeurs et opte pour une application souple de la clause limitative de responsabilité en faveur de l’architecte.
A rapprocher : Cass. civ. 3ème, 19 mars 2013, n°11-25.266 (« le juge est tenu de respecter les stipulations contractuelles excluant les conséquences de la responsabilité solidaire ou in solidum d’un constructeur à raison des dommages imputables à d’autres intervenants. »)