Vente aux enchères : Responsabilité du commissaire-priseur et restitution du prix

Photo de profil - BARRUET Sophie | Avocat | Lettre des réseaux

BARRUET Sophie

Avocat

Cass. civ. 1ère, 3 mai 2018, n°16-13.656

Si les restitutions consécutives à l’annulation d’une vente pour erreur sur la substance n’ont lieu qu’entre les parties contractantes, le commissaire-priseur peut être condamné à des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l’acquéreur par sa faute.

Ce qu’il faut retenir : Si les restitutions consécutives à l’annulation d’une vente pour erreur sur la substance n’ont lieu qu’entre les parties contractantes, le commissaire-priseur peut être condamné à des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l’acquéreur par sa faute.

Pour approfondir : Au cours d’une vente aux enchères publiques organisée le 16 décembre 2004 par la caisse de Crédit municipal de Paris (le Crédit municipal), avec le concours du GIE des commissaires-priseurs, M. X a acquis une statue en bronze représentant « un satyre portant Bacchus ». Cette statue était accompagnée d’un certificat d’authenticité délivré par un expert, qui la datait du premier siècle avant Jésus-Christ. Cet objet avait été remis en nantissement par M. Y au Crédit municipal, afin de garantir le remboursement du prêt que celui-ci lui avait consenti.

Par ordonnance du 10 novembre 2005, le juge des référés, saisi par M. X, a désigné deux experts, qui ont daté la statue du dix-huitième siècle.  Après le dépôt du rapport des experts judiciaires, M. X a assigné le Crédit municipal, le GIE des commissaires-priseurs, l’expert qui avait estimé en premier lieu l’objet et leurs assureurs respectifs en annulation de la vente. Le Crédit municipal a appelé en la cause M. Y.                                   

La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel, en ce qu’il a rejeté la demande de l’acquéreur tendant à condamner le Crédit municipal, le GIE des commissaires-priseurs et l’expert à garantir la restitution du prix de vente.

D’une part, la Cour de cassation énonce qu’en constatant que le GIE des commissaires-priseurs, qui bénéficiait d’une connaissance dans le domaine des arts et admettait avoir éprouvé un doute sur l’estimation du bronze, l’ayant conduit à demander l’institution d’une seconde expertise, avait, en dépit de ce doute, procédé à la vente du bien sans émettre la moindre réserve sur sa valeur dans le catalogue dont, au contraire, les mentions relatives à son caractère exceptionnel et à son appartenance à une collection familiale étaient destinées à augmenter l’attrait des potentiels acquéreurs pour le bien litigieux et à renforcer leur croyance en son authenticité, la Cour d’appel a caractérisé l’existence d’une faute de nature à engager, à l’égard de l’acquéreur, la responsabilité du GIE des commissaires-priseurs, peu important que celui-ci n’ait pas été l’organisateur de la vente.

D’autres part, la Cour de cassation précise que si les restitutions consécutives à l’annulation d’une vente pour erreur sur la substance n’ont lieu qu’entre les parties contractantes, le commissaire-priseur peut être condamné à des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l’acquéreur par sa faute. En l’espèce, après avoir retenu la responsabilité du GIE des commissaires-priseurs, c’est à bon droit que la Cour d’appel a décidé, qu’ayant procédé à la vente litigieuse, le GIE des commissaires-priseurs était redevable envers M. X du montant des frais d’adjudication.

A rapprocher : Cass. civ. 1ère, 17 décembre 2009, n°07-20.051

Sommaire

Autres articles

some
COVID-19 : L’impact de l’état d’urgence sanitaire sur le droit immobilier
Les thèmes de droit immobilier concernés par les ordonnances publiées le 26 mars 2020 sont essentiellement la pérennité de l’usage des locaux professionnels et commerciaux, les expulsions locatives et la copropriété des immeubles bâtis. Ce qu’il faut retenir : Selon l’article…
some
La faculté conventionnelle de rétractation de l’acquéreur professionnel
Cass. civ. 3ème, 5 décembre 2019, n°18-24.152, Publié au Bulletin L’arrêt commenté retient que la faculté conventionnelle de rétractation de l’acquéreur professionnel est parfaitement valable. Ainsi, la Cour de cassation précise-t-elle, pour la première fois, que les parties peuvent conférer…
some
VEFA : Consécration du mécanisme de la vente d’immeuble futur « prêt à finir »
Arrêté du 28 octobre 2019 fixant la liste limitative et les caractéristiques des travaux réservés par l'acquéreur d'un immeuble vendu en l'état futur d'achèvement Le très attendu arrêté fixant la liste limitative des travaux réservés ainsi que les caractéristiques auxquelles…
some
Vente immobilière : DPE erroné et perte de chance de négocier une réduction du prix
Cass. civ. 3ème, 21 novembre 2019, n° 18-23.251, Publié au bulletin Un diagnostic de performance énergétique erroné entraine, pour les acquéreurs d’un bien immobilier, un préjudice s’analysant en une perte de chance de négocier une réduction du prix de vente.…
some
Vente immobilière : absence de droit de l’acquéreur en cas de report du transfert de propriété
Cass. civ. 3ème, 19 septembre 2019, n°18-14.172 Dans le cadre de la conclusion d’un contrat de vente d’un bien immobilier, dès lors que les parties ont convenu de différer le transfert de propriété jusqu’à la régularisation de la vente par…
some
Absence de disproportion de la mesure d’expulsion eu égard à la gravité de l’atteinte au droit de propriété
Cass. civ. 3ème, 4 juillet 2019, n° 18-17.119 L’expulsion étant la seule mesure de nature à permettre au propriétaire de recouvrer la plénitude de son droit sur le bien occupé illicitement, l’ingérence qui en résulte dans le droit au respect…