Cass. civ. 3ème, 21 décembre 2017, FS-P+B + I, n°16-10.583
Le commandement prévu à l’article L.145-41 du Code de commerce est nécessairement un acte d’huissier de justice et ne peut être remplacé par une lettre recommandée valant sommation quand bien même il en résulterait une interpellation suffisante.
Dans un arrêt rendu le 21 décembre 2017, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation rappelle au visa des articles L.145-41 et L.145-15 du Code civil que la mise en œuvre de la clause résiliation de plein droit ne peut résulter que d’un acte extrajudiciaire.
Ce qu’il faut retenir : Le commandement prévu à l’article L.145-41 du Code de commerce est nécessairement un acte d’huissier de justice et ne peut être remplacé par une lettre recommandée valant sommation quand bien même il en résulterait une interpellation suffisante.
Pour approfondir : Aux termes de l’article L.145-41 du Code de commerce « toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai ».
Dans cette affaire, la clause résolutoire stipulée dans le bail faisait mention d’une résiliation pouvant intervenir de plein droit « après une mise en demeure ou un commandement de payer ».
La Cour d’appel de Nouméa a considéré dans son arrêt qui sera censuré que « la lettre recommandée valant sommation remplit les conditions légales lorsqu’il en résulte une interpellation suffisante du débiteur », et qu’en l’espèce la sommation de payer rappelait au locataire qu’il disposait d’un délai d’un mois pour régler sa dette locative.
Ce faisant, la Cour de Nouméa ne faisait que confirmer une position qu’elle avait déjà prise lors d’un précédent contentieux. On ne pourra d’ailleurs pas lui faire grief d’adopter une position de résistance face à la Cour de cassation car la Cour suprême avait, à l’époque, validé cette analyse (Cass. civ. 3ème, 13 mars 2002, n°00-17.391).
On aurait pu penser dans la mouvance de la loi Pinel visant à alléger le formalisme dans la gestion du bail commercial que cette jurisprudence pourrait être confirmée.
Tel n’est pas le cas puisque la Cour de cassation considère désormais que le recours à l’acte extrajudiciaire est impératif, quelles que soient les stipulations du bail.
La position retenue par la Cour de cassation dans l’arrêt commenté est en réalité conforme à la lettre du texte.
En effet, l’article L.145-41 du Code de commerce fait expressément référence à un « commandement », c’est-à-dire à un acte d’huissier.
Or, la Cour d’appel de Nouméa semble avoir confondu la notion de « commandement » et celle de « mise en demeure ». Elle prend en effet le soin d’analyser la mise en demeure litigieuse pour considérer que celle-ci-était valable dès lors qu’il en résultait une interpellation suffisante. Cependant, elle ne faisait que reprendre la définition de la mise en demeure telle que prévue à l’article 1344 du Code civil (ancien article 1139 du Code civil).
La mise en demeure était par conséquent peut-être valable sans pour autant qu’elle puisse être assimilée à un commandement au sens de l’article L.145-41 du Code de commerce.
Il restait la question de savoir si les parties pouvaient, dans le bail, aménager le formalisme de la mise en œuvre de la clause résolutoire.
Tel était le cas dans cette affaire puisqu’il était stipulé que la clause résolutoire pouvait être mise en œuvre après une mise en demeure d’exécution ou un commandement de payer.
La difficulté est que cet aménagement conventionnel est proscrit par l’article L.145-15 du Code civil aux termes duquel « sont réputés non écrits, quelle que soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements qui ont pour effet de faire échec au droit au renouvellement institué par le présent chapitre ou aux dispositions des articles L.145-4, L.145-34 à L.145-41 ».
C’est ainsi très logiquement que la cassation est intervenue au double visa de l’article L.145-41 et L.145-15 du Code de commerce.
A rapprocher : Article L.145-41 du Code de commerce ; Article L.145-15 du Code de commerce ; Cass. civ. 3ème, 13 mars 2002, n°00-17.391 ; CA Nouméa, 15 octobre 2015, RG n°14/00122