Tribunal des conflits, 12 juin 2017, n°C4085
Le Tribunal des conflits est venu préciser que […] le juge administratif reste compétent pour se prononcer sur les mesures qu’implique l’annulation de la décision de préemption.
Ce qu’il faut retenir : Par un arrêt en date 12 juin 2017, le Tribunal des conflits est venu préciser que, nonobstant la création, par la loi ALUR, d’un bloc de compétence au profit du juge judiciaire pour statuer sur les conséquences de la vente réalisée sur la base d’une décision de préemption ensuite annulée, le juge administratif reste compétent pour se prononcer sur les mesures qu’implique l’annulation de la décision de préemption.
Pour approfondir : La société Foncière Mahdia s’était portée acquéreur, auprès de la SCI du 123 rue du Chemin Vert, d’un immeuble situé à Paris, mais l’office public de l’habitat Paris Habitat a exercé son droit de préemption le 29 juillet 2013.
La décision de préemption a toutefois été annulée par le tribunal administratif de Paris : il incombait donc à l’OPH Paris-Habitat, en application des dispositions de l’article L.213-11-1 du Code de l’urbanisme, de proposer en premier lieu à la SCI du 123 rue du Chemin Vert, ancien propriétaire de l’immeuble, d’acquérir le bien en priorité puis, en cas de refus, de proposer cette acquisition à la société Foncière Mahdia, acquéreur évincé.
S’étant abstenue de procéder à ces deux formalités nonobstant les demandes faites en ce sens par la société Foncière Mahdia, cette dernière saisit le tribunal administratif d’un recours en annulation contre le rejet implicite de l’OPH Paris Habitat de faire ces deux propositions d’acquisition.
L’OPH Paris Habitat ayant soulevé l’incompétence des juridictions administratives au projet des juridictions judiciaires, le tribunal administratif de Paris saisit le Tribunal des conflits pour se prononcer sur la question de compétence.
Le Tribunal des conflits tranche au profit des juridictions administratives.
Il rappelle d’abord que, en application des dispositions de l’article L.213-12 du Code de l’urbanisme, « lorsque la juridiction administrative a annulé une décision de préemption d’un bien, il appartient au juge judiciaire, en cas de non-respect, par le titulaire du droit de préemption, de son obligation de proposer l’acquisition du bien à l’ancien propriétaire, puis, le cas échéant, à l’acquéreur évincé, de connaître des actions indemnitaires que l’un et l’autre sont susceptibles d’engager » ; il ajoute ensuite que « le juge judiciaire est par ailleurs seul compétent pour statuer sur une action en nullité du contrat de vente par lequel la personne détentrice du droit de préemption est devenue propriétaire du bien ».
Mais il rappelle également que c’est au juge administratif qu’il appartient d’exercer les pouvoirs qu’il tient des articles L.911-1 du Code de justice administrative, et en particulier de prescrire à la personne publique dont la décision a été annulée de prendre une mesure d’exécution déterminée, le cas échéant sous astreinte.
Dans ces conditions, le tribunal des conflits considère qu’il appartient au juge administratif de se prononcer sur la légalité de la décision implicite de l’office public habitat Paris Habitat de refuser de proposer l’acquisition de l’immeuble illégalement préempté à l’ancien propriétaire, d’abord, et à l’acquéreur évincé, ensuite.