Cass. civ. 3ème, 27 avril 2017, n°16-10753
Cet arrêt publié au bulletin nous enseigne, par des faits inédits, que si le propriétaire d’un bien immobilier bénéficie d’une présomption de propriété des accessoires de ce bien suivant le principe « l’accessoire suit le principal » de l’article 546 du Code civil, cette présomption peut être renversée par la preuve contraire résultant de la prescription acquisitive du propriétaire de la parcelle sur laquelle sont situés lesdits accessoires.
Ce qu’il faut retenir : Cet arrêt publié au bulletin nous enseigne, par des faits inédits, que si le propriétaire d’un bien immobilier bénéficie d’une présomption de propriété des accessoires de ce bien suivant le principe « l’accessoire suit le principal » de l’article 546 du Code civil, cette présomption peut être renversée par la preuve contraire résultant de la prescription acquisitive du propriétaire de la parcelle sur laquelle sont situés lesdits accessoires.
Pour approfondir : En l’espèce, le nouveau propriétaire d’un moulin a assigné le propriétaire de parcelles sur lesquelles étaient situés le canal d’irrigation du moulin et les ouvrages accessoires à ce dernier en vue d’obtenir l’interdiction de faire obstacle à son passage sur les francs bords du canal dont il revendiquait l’entière propriété sur le fondement de l’article 546 du Code civil.
Le propriétaire desdites parcelles s’est opposé à ces demandes et a revendiqué à son tour la propriété des ouvrages par le jeu de la prescription acquisitive malgré leur caractère incontestablement accessoire au moulin.
Dès lors, deux règles s’opposaient :
- d’une part l’adage « accessorium sequitur principale », selon lequel l’accessoire suit le sort du principal, d’une part (article 546 du Code civil) ;
- d’autre part le principe en vertu duquel la possession paisible pendant un certain temps (30 ans ou 10 ans celui qui acquiert est de bonne foi et dispose d’un titre) permet d’accéder à la propriété de la chose dont le propriétaire s’est visiblement désintéressé (articles 2258 et suivants du Code civil).
La Cour d’appel fait primer l’adage précité et fait droit à la demande du propriétaire du moulin au motif que le principe selon lequel « l’accessoire suit le principal » s’oppose à ce qu’une prescription acquisitive fasse échec à ce droit d’accession.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt jugeant au contraire que si l’article 546 du Code civil instaure bien, en faveur de celui qui l’invoque, une présomption de propriété par accession, celle-ci peut être renversée par la preuve contraire résultant de la prescription acquisitive.
Il convient de noter que la jurisprudence rendue sous l’article 546 du Code civil concerne quasiment exclusivement des problématiques liées à la propriété de canaux d’irrigation et d’ouvrages accessoires de moulins (Cass.civ 3ème, 5 janvier 1978, Bull.civ. III, n°13).
Le problème de cette espèce se serait d’ailleurs posé en des termes différents si les ouvrages en cause n’avaient pas pu être considérés comme des ouvrages accessoires au moulin : dans ce cas, le propriétaire des parcelles n’aurait en effet pas eu à opposer au propriétaire du moulin la prescription acquisitive de l’article 2258 du Code civil mais aurait pu se prévaloir (i) soit de l’article 555 du Code civil relatif aux constructions sur le terrain d’autrui selon lequel « lorsque les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers et avec des matériaux appartenant à ce dernier, le propriétaire du fonds a le droit (…) soit d’en conserver la propriété, soit d’obliger le tiers à les enlever » (ii) soit de la jurisprudence relative à l’empiètement (article 545 du Code civil) qui permet au propriétaire d’un terrain sur lequel la construction d’un voisin empiète d’en demander la démolition.
A rapprocher : articles 544 et suivants du Code civil, articles 2258 et suivants du Code civil