Cass. civ., 3ème, 2 mars 2017, n°15-24.876
La clause subrogeant le preneur dans les droits du bailleur envers l’assureur dommages-ouvrage n’est pas de nature à exonérer le bailleur de la garantie légale des vices cachés instituée par l’article 1721 du Code civil.
Ce qu’il faut retenir : La clause subrogeant le preneur dans les droits du bailleur envers l’assureur dommages-ouvrage n’est pas de nature à exonérer le bailleur de la garantie légale des vices cachés instituée par l’article 1721 du Code civil.
Pour approfondir : En l’espèce, un bail commercial a été consenti le 29 septembre 2010 portant sur des locaux à destination de résidence de tourisme. Ces locaux ont été sous-loués par le preneur. Le bail principal contenait une clause aux termes de laquelle, en cas d’évènement exceptionnel affectant la résidence et ne permettant pas une occupation effective et normale du bien, le loyer serait suspendu. En outre, le bail prévoyait également une clause subrogeant irrévocablement le preneur au bailleur dans ses droits et obligations relativement à la mise en jeu contre le vendeur, de toutes les garanties découlant de la vente et de la construction, telles que les garanties d’achèvement, biennales et décennales.
Un désordre de nature décennale a été dénoncé à l’assureur dommages-ouvrage, lequel a refusé d’indemniser le preneur de la perte des sous-loyers, en arguant que l’exploitation n’avait pas été rendue impossible les désordres. Le bailleur a sollicité la condamnation du preneur principal au paiement des loyers et charges que ce dernier avait suspendu et de son côté, le preneur a sollicité la condamnation du bailleur à lui garantir la perte des sous-loyers.
Le tribunal d’instance a rejeté la demande en indemnisation du locataire principal en retenant que les désordres affectant l’appartement objet du litige relevaient de la garantie dommages-ouvrage pour laquelle, en application de la clause du bail, la société locataire avait été formellement subrogée dans les actions et droits du propriétaire, ainsi que pour percevoir les indemnités relatives aux différentes garanties de vente et de construction. Le Tribunal a ensuite retenu qu’il ne ressortait pas du bail que le propriétaire substitue sa garantie à celle de l’assureur en cas qualification différente de l’indemnité due entre l’assureur et le locataire. Le preneur s’est pourvu en cassation.
La Cour de Cassation censure cette décision au visa de l’article 1721 du Code civil, lequel prévoit qu’il « est dû garantie au preneur pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l’usage, quand même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail. S’il résulte de ces vices ou défauts quelque perte pour le preneur, le bailleur est tenu de l’indemniser. »
La Cour de cassation retient que la clause subrogeant le preneur dans les droits du bailleur envers l’assureur dommages-ouvrage n’est pas de nature à exonérer le bailleur de la garantie légale des vices cachés instituée par l’article 1721 du Code civil.
Il convient de rappeler à ce sujet que si l’article 1721 du Code civil n’est pas d’ordre public et qu’il peut y être dérogé par des conventions particulières, la jurisprudence retient que la clause doit être expresse et non équivoque (Cass. Soc. 21 juin 1958).
A rapprocher : Cass. soc., 21 juin 1958, Veuve de Montal c/ Société anonyme des Établissements Pigier